J'ai un rêve (je sais je suis naïf, mais mes rêves je travaille à les voir se réaliser un jour) que ce qui bouscule depuis quelques jours notre pays et plus largement, puisque, semble-t-il, une espèce d'effet boule de neige enfle et se répand, soit l'étincelle qui allume un brasier de remise en cause de nos sociétés et machistes, et racistes, et de domination par la violence verbale et physique. Ce jour, coïncidence heureuse, est la "Journée Internationale pour l'élimination de la violences à l'égard des femmes", j'ai exprimé plus d'une fois combien je suis généralement rétif à ce type de mise en avant pour une très simple raison, qui est, qui plus est, d'autant plus prégnante en l'occurrence à ce sujet précisément, ces causes doivent être chaque jours prioritaires. Et bien paradoxalement, parce que je ne suis pas à une contradiction près, cette fois je vais la mettre moi aussi au premier plan cette journée, parce qu'il n'est pas possible qu'on se résigne à devoir la renouveler l'an prochain sans mettre toute notre conviction et nos arguments en œuvre pour l'éradiquer, l'éliminer, dès maintenant.
Rien de ce que je pourrais en dire n'apportera quoi que ce soit de plus pertinent que tout ce qui a déjà été dit maintes et maintes fois, par de nombreuses personnes bien mieux placées que moi pour dénoncer et pointer les formes que prennent ces violences, par contre ce qui en fait le fond, je crois que je suis aussi bien placé que quiconque pour témoigner que chacun doit y mettre toute sa vie pour en changer les fondations.
Partout dans le monde les violences faites aux femmes sont quotidiennes et ordinaires, parce que nos sociétés sont profondément machistes, la notion de supériorité d'un sexe sur l'autre existe. Cela n'est ni naturel, ni dû au hasard, ni inéluctable, mais pour que certains hommes qui l'ont décidé assoient leurs prétendue supériorité et primauté, il fallait bien qu'ils établissent des argumentations injustes et injustifiées pour inventer pareille dénaturation de la vérité.
D'une façon plus générale cette violence envers les femmes ne peut être isolée totalement de la violence globale de laquelle elle émerge en ce moment mais dans laquelle elle baigne en réalité. C'est le principe même de la possibilité d'user de violences de tous types, envers d'autres humains qui est à vaincre, en chacun de nous. Je sais de quoi je parle cette violence m'a vaincu moi aussi à trois reprises, je l'ai infligé dans trois moments pendant lesquels j'ai perdu pieds, perdu tout contrôle, trois circonstances que je vie comme trois défaites majeures dans une vie que j'ai pourtant vouée à prôner la non violence, la paix, l'Amour, la bienveillance et le pardon. Ces trois "dérapages" datent maintenant je me suis encore plus aguerri dans mon choix de contrôle au fil du temps, dans ma volonté de toujours trouver une autre solution, parce que la violence n'en est jamais une, mais rien ne prouve que je ne faillirais pas encore tant cette capacité de violence peux nous envahir et nous réduire à néant parfois. Ce n'est pas une excuse que j'évoque ou que j'invoque là, c'est un constat malheureux, nous sommes nés, nous avons été éduqués, nous avons grandi dans un monde qui met la victoire, que procure souvent la violence, au sommet de ce qu'il faut atteindre.
Puisqu'il n'est pas possible d'aborder toutes les formes que prennent les violences, et donc en priorité cette fois, le jour qui y est "consacré", à l'encontre des femmes, je ne vais orienter mon évocation du jour que vers un des aspects de nos quotidiens, notre, et les attitudes sur les réseaux sociaux. J'en déplore régulièrement les affres, à croire que pour un grand nombre d'utilisat·rice·eur·s, ils sont un défouloir, un lieu où l'on peut déverser ce qu'on ne s'autoriserais pas à cracher à qui que ce soit si on devait le regarder dans les yeux! En ce qui concerne donc en particulier les femmes, c'est le harcèlement en ligne qui fait des ravages.
Au delà des seuls faits de harcèlement, les réseaux sociaux sont le théâtre de violences permanentes. Que les avis soit nombreux qu'ils soient divergeants, contraires, antagonistes, que la confrontation de nos idées soit normale, même nécessaire, qu'une forme d'opposition et de lutte incessante des concepts et idées vive je ne vois pas comment l'éviter, mais aussi contraires et opposées que puissent-être les convictions de chacun·e·s, si on laisse une place à la violence dans nos échanges même verbaux sur les réseaux, alors plus rien de possiblement constructif ne peut en surgir.
Interrogeons nous sur nos propensions à maltraiter l'autre en parole, cette violence là est la mère de toutes les autres!
Moi qui suis par nature bouillant je suis devenu, parce que je l'ai décidé, plus prompt à m'autocensurer qu'à tout lâcher, j'enrobe, je dilue, j'édulcore constamment non pas par incertitude, ou acceptation, ou par manque de conviction ou faiblesse, mais pour ne pas rebuter et faire fuir en quelques mots trop tranchants et clivant. En fait je crois que je traduis en acte aussi dans mes paroles le sens profond de l'adage qui dit que nos libertés individuelles s’arrêtent là où celle des autres commence. Je me refuse à toute violence verbale, toute insulte, tout dénigrement. Je pense que c'est l'attitude que nous devons apprendre à avoir partout y compris donc sur les réseaux sociaux, et pas seulement à l'égard des femmes.